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Objet : Proposition de modification au plan officiel et au règlement de zonage; cliniques de méthadone et pharmacies, dossier no OZ-8004

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Février 24, 2012

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[ENVOI PAR COURRIEL ET POSTES CANADA]

Le maire Joe Fontana, le président Bud Polhill et

les membres du comité de la planification et de l’environnement
Hôtel de ville de London
300, avenue Dufferin
B.P. 5035 N6A 4L9

Monsieur le Maire, Monsieur le Président et Mesdames et Messieurs les membres du comité,

J’écris cette lettre pour commenter la proposition de modifications au plan officiel et au règlement de zonage de la ville. Au moment où vous envisagez ces modifications, la Commission ontarienne des droits de la personne (CODP) souhaite énoncer certains principes inhérents aux droits de la personne susceptibles d’influer sur votre décision et poser quelques questions.

La ville a beaucoup étudié les questions concernant les cliniques et les pharmacies qui fournissent des traitements à la méthadone aux membres de la collectivité. Je félicite la ville d’avoir fait de la prestation efficace de services aux personnes nécessitant des traitements à la méthadone un objectif central de son travail. Cependant, je crains que certains éléments des modifications proposées n’aillent à l’encontre de cet objectif et des droits des personnes handicapées nécessitant un traitement à la méthadone.

Les modifications proposées restreignent la façon dont les services de méthadone sont dispensés aux personnes handicapées. Or, elles tombent sous le coup de l’article 1 du Code des droits de la personne de l’Ontario (« le Code ») qui interdit la discrimination en matière de services contre les personnes handicapées, y compris les toxicomanes.

Tout en examinant les modifications proposées, la ville doit considérer ses obligations en vertu du Code. Conformément au Code et au jugement dans l’affaire « Meiorin » prononcé en 1999 par la Cour suprême du Canada (Colombie Britannique (Public Service Employee Relations Commission) c. BCGSEU, [1999] 3 R.C.S. 3)), la ville :

  • Ne doit pas exercer de la discrimination contre les personnes toxicomanes. Toute modification au plan officiel ou au règlement qui cible ou affecte négativement les personnes toxicomanes est illégale à moins d’avoir été adoptée de bonne foi et d’être nécessaire pour atteindre un objectif de planification légitime.
  • Doit s’efforcer dans la mesure du possible, sans subir une contrainte excessive, d’accommoder les besoins des personnes toxicomanes.

La Commission des affaires municipales de l’Ontario (CAMO) a également appuyé cette approche dans la cause Kitchener (City) Official Plan Amendment No. 58, [2010] O.M.D.B. No. 666, 64 O.M.B.R. 283. La CAMO a affirmé qu’une municipalité qui veut justifier un règlement discriminatoire doit démontrer que celui ci a été établi de bonne foi, était raisonnable et que des efforts réels et substantiels ont été déployés pour accommoder les besoins des personnes négativement affectées.

C’est la loi – mais c’est également logique. Bien que les incapacités dues à des troubles mentaux soient courantes dans nos collectivités, les personnes atteintes de ces incapacités (y compris de toxicomanies) sont confrontées à de nombreux obstacles, tant individuels qu’institutionnels, qui les empêchent de participer pleinement à la société. Ces obstacles découlent largement d’attitudes sociétales négatives à l’égard des troubles mentaux et contribuent à une inégalité systémique, y compris à un manque d’accès aux traitements et aux services de soutien appropriés. La discrimination peut exacerber les effets des incapacités dues à la toxicomanie en entravant l’obtention d’un traitement, en déclenchant des incapacités dues aux troubles mentaux et aux toxicomanies ou en les aggravant et en faisant obstacle au rétablissement en limitant le soutien disponible.

Zonage axé sur les gens

La CODP s’associe à des particuliers et à des collectivités partout dans la province pour mettre fin à la discrimination et éliminer les obstacles auxquels font face les groupes vulnérables. Le zonage axé sur les gens est un de ces obstacles.

Dans la cause Kitchener, la CAMO s’est penchée sur la question du zonage axé sur les gens :
…lorsqu’on lui a demandé pourquoi les services de consultation étaient également interdits dans un quartier [particulier], le planificateur de la ville a répondu que la collectivité ne voulait pas que les usagers des services sociaux traversent le quartier pour s’y rendre : « Cela exacerberait l’environnement social négatif. » À n’en pas douter, l’accent n’était pas sur les usages, mais sur les usagers.

Nous voulons travailler avec la ville pour faire en sorte que les modifications apportées à son plan officiel et à son règlement de zonage ne fassent pas de zonage axé sur les gens. Nous voulons nous assurer qu’entre autres choses les décisions de zonage général, les normes concernant la surface de plancher brute et les distances minimales de séparation ne soient pas utilisées d’une manière qui enfreint le Code. Ces outils ne devraient pas cibler les toxicomanes ni avoir un impact discriminatoire sur eux. Toutes les décisions doivent avoir un objectif de planification réel et la ville devrait s’assurer que tous les changements en matière de planification qu’elle apporte accommodent les besoins des personnes toxicomanes.

Décisions de zonage général

La ville propose de zoner les cliniques et les pharmacies de méthadone différemment des cliniques et pharmacies ordinaires. Nous encourageons la ville à considérer ce qui suit :

  • Ce zonage plus restrictif est-il fondé sur des opinions discriminatoires des clients plutôt que sur des objectifs de planification légitimes?
  • Le système d’interruption – selon lequel une clinique ordinaire peut dispenser des services de méthadone à 30 clients par jour au maximum – est il arbitraire?
  • Comment le zonage des cliniques et des pharmacies de méthadone pourrait il limiter les services de méthadone offerts aux personnes toxicomanes?

Normes de surface de plancher brute

La ville propose de mettre en œuvre une norme de surface de plancher brute de manière à ce que les cliniques de méthadone soient tenues de réserver au moins 15 % de leur surface de plancher brute pour une salle d’attente. Cette restriction ne semble pas s’appliquer aux autres types d’établissements régis par le règlement de zonage. Nous encourageons la ville à considérer ce qui suit :

  • Ces normes sont elles fondées sur des opinions discriminatoires à l’égard du comportement des clients plutôt que sur des pratiques de planification légitimes?
  • La ville a-t-elle considéré les répercussions de ces normes de surface de plancher brute sur les services de méthadone offerts actuellement et à l’avenir aux personnes toxicomanes? Par exemple, combien de bâtiments actuels réservent 15 % de leur surface de plancher brute ou plus pour une salle d’attente?

Distances minimales de séparation

Les distances de séparation arbitraires peuvent entraîner des enfreintes au Code. Bon nombre de municipalités veulent utiliser les distances minimales de séparation pour gérer la surreprésentation de certains types de services dans un quartier. Or, les distances minimales de séparation peuvent avoir des répercussions négatives sur les personnes qui comptent sur ces options.

La ville propose que les cliniques et les pharmacies de méthadone soient situées à 300 mètres des écoles, des bibliothèques, des stades, des piscines et des Western Fairgrounds. Nous encourageons la ville à considérer ce qui suit :

  • La distance minimale de séparation est elle fondée sur des opinions discriminatoires à l’égard du comportement des clients plutôt que sur des pratiques de planification légitimes?
  • Quelle est la justification de la distance de séparation de 300 mètres? Est elle arbitraire?
  • Sur quoi repose la décision de focaliser la séparation sur les écoles, les bibliothèques, les stades, les piscines et les Western Fairgrounds?
  • Comment cette distance minimale de séparation affectera t elle les services de méthadone offerts aux personnes toxicomanes?
  • Qu’arrivera t il aux cliniques et aux pharmacies actuelles qui ne répondent pas à cette exigence?

Évaluation des répercussions

Comme on l’a vu précédemment, la ville est tenue d’envisager les répercussions des modifications sur les personnes toxicomanes et d’accommoder leurs besoins.

Nous encourageons la ville à :

  • Inclure des références au Code dans toute forme modifiée du plan officiel et du règlement. Ces références sensibilisent le public à ses droits en vertu du Code et réaffirment que la ville est déterminée à faire en sorte que rien dans son plan officiel ou ses règlements ne peut enfreindre le Code.
  • S’assurer que les personnes toxicomanes qui comptent sur la méthadone aient un accès ininterrompu et pratique aux services dont elles ont besoin.
  • S’assurer que les réunions et les discussions publiques ne soient pas discriminatoires et n’assujettissent pas les groupes protégés par le Code à des questions négatives injustifiées ou à des attaques personnelles. Par exemple, il importe d’éviter d’utiliser ou de tolérer les stéréotypes envers les utilisateurs de méthadone, notamment qu’ils sont indésirables, aptes à commettre des actes criminels et ne font pas partie de la collectivité. Nous espérons que, lors des réunions comme celle que vous tiendrez lundi, vous interromprez et traiterez l’emploi de commentaires biaisés et réorienterez la discussion vers des questions de planification légitime, comme l’exige la Loi sur l’aménagement du territoire.

Objectifs de planification légitimes

Les modifications aux plans officiels et aux règlements de zonage doivent répondre à des objectifs de planification légitimes. Nous encourageons la ville à examiner soigneusement les objectifs des modifications et à s’assurer qu’ils se rapportent à des questions de planification et ne peuvent pas être atteints grâce à d’autres mécanismes de réglementation.

La CODP vient de publier un guide pour les municipalités intitulé Dans la zone : Logement, droits de la personne et planification municipale. Bien que le guide porte sur le logement, les principes en matière de droits de la personne et les recommandations sont pertinents pour le contexte des services. Par exemple, vous pourriez faire référence aux sections concernant l’opposition discriminatoire des quartiers, l’importance d’éviter la discrimination et le harcèlement lors des réunions communautaires et le concept de zonage axé sur les gens. Le guide est consultable en ligne sur le site Web de la CODP.

L’avenir

Lorsque vous examinerez ces modifications, j’espère que vous envisagerez les répercussions en matière de droits de la personne sur les gens vulnérables qui vivent et utilisent des services dans votre collectivité et dont la vie sera affectée par vos décisions. Un examen de ces modifications aux règlements sous la lentille de droits de la personne vous aidera à faire en sorte que les personnes vulnérables se sentent bienvenues dans vos quartiers.

La CODP vous aidera volontiers à traiter de cette question. Pour obtenir un complément d’information sur les droits de la personne et la planification, communiquez avec Margaret Flynn au 416 326 9858 ou, par courriel, à Margaret.Flynn@ohrc.on.ca.

Je vous prie d’agréer, Monsieur le Maire, Monsieur le Président et Mesdames et Messieurs les membres du comité, l’expression de mes sentiments dévoués.

La commissaire en chef,
[Original signé par]
Barbara Hall, B.A, LL.B, Ph.D. (hon.)

c. c. Honorable Deb Matthews, ministre de la Santé et des Soins de longue durée
Eric Lalande, planificateur, ville de London
Margaret Flynn, avocate, CODP